Bosser le concours de l’ENM chez soi ou en bibliothèque ?

Salut à tous / toutes !

            Aujourd’hui, je souhaite aborder avec vous un sujet qui déchaine les passions depuis des décennies dans toutes les facs, les IEJ et les prépas de France. Combien de vies brisées, de familles séparées, d’amitiés interrompues et de cœurs meurtris pour avoir découvert que leur camarade de prépa préfère travailler à la bibli, ou chez lui (et inversement) ?

            J’abuse sans doute un peu mais la question mérite d’être posée.

            D’un côté, nous avons le groupe des « biblios » : tous les jours ouvrables, et parfois le samedi pour les vrais warriors, ils débarquent à la bibli avec la banane aux lèvres, les cheveux au vent ; ils dégainent leur carte, ouvrent leur sac nonchalamment pour le contrôle Vigipirate ; s’assoient sur leur siège préféré, à leur étage préféré, sortent leurs bouquins préférés et les surligneurs pour passer une belle journée à faire des régimes matrimoniaux.

            De l’autre, nous avons les « casaniers », également appelés « ermites » : à peine levé(e)s, ils s’installent en pyjama devant leur bureau, avec les codes et les cours déjà ouverts à la page de la veille ; la tasse remplie de Ricoré prête à être engloutie ; les yeux encore tout petits, mais qui traduisent déjà la détermination à se mettre une bonne orgie de révisions, du moins jusqu’à la prochaine tasse de thé.

            Ces deux camps sont irréconciliables et se livrent une guerre sans merci. Je passe les deux méthodes au banc d’essai et je vous livrerai ma préférence en fin d’article !

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Droit des successions ? Régimes matrimoniaux ? Méthodologie de la note de synthèse ? Une belle journée en perspective !


Travailler en bibliothèque

Avantages :

  • Se motiver entre forçats de la prépa : préparer le concours de l’ENM, ce n’est pas tous les jours très marrant. On se tape des 5 en droit public, on se demande le sens de l’épreuve de note de synthèse, au point parfois de perdre la motivation nécessaire à la réussite. Venir à la bibli permet de croiser d’autres forçats de la prépa et de bien rigoler lors des pauses : les AJ racontent leurs meilleures anecdotes, les L1 et L2 vous regardent avec admiration… Il paraît même que certain(e)s ont réussi à se faire des ami(e)s en prépa.
  • Se comparer aux autres : j’entends par là une comparaison « saine », sans esprit de compétition particulier. Le fait de savoir sur quoi les autres bossent et avec quoi permet de faire évoluer sa méthode de travail durant l’année. On teste de nouvelles méthodes d’apprentissage, de nouveaux manuels, on se prête nos copies pour se perfectionner…
  • Les ouvrages disponibles : être à la bibli permet de feuilleter des manuels vite fait, de les emprunter si besoin, et d’en découvrir d’autres que l’on pourra éventuellement acheter ensuite pour mieux les tartiner, les surligner, les défoncer jusqu’à ce que les pages commencent à en tomber.
  • Le regard sentencieux des autres : « L’enfer, c’est les autres », comme chacun sait. Mais le regard des autres peut ici avoir un effet bénéfique sur vos capacités de travail. Quand toute une bibli peut voir l’écran de votre ordi, on se laisse moins facilement aller à la procrastination. Le voisin fait croire qu’il s’en fout mais il n’en pense pas moins de vos vidéos de pandas qui font du toboggan.

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Inconvénients :

  • La file d’attente et le manque de place(s) : quand on est motivé(e) pour travailler, rien de pire que d’être coupé(e) dans son élan. On doit pouvoir travailler là, maintenant, tout de suite, pas après une demi-heure d’attente dans une file entouré(e) de hipsters en L1. Dans les grandes bibliothèques parisiennes comme la BSG, la BSB, Beaubourg ou à Sciences Po, ça frise parfois le comique (pour ceux qui passent devant hein, pas pour ceux qui attendent).
  • Le manque de confort : la bibli, globalement, n’a pas été conçue pour être un lieu de bien-être et d’épanouissement. Les chaises sont moins confortables qu’un banc de RER ; la lumière est parfois trop faible (parfait pour une soirée libertine mais mauvais pour les yeux du juriste) ; il fait parfois trop froid, ou trop chaud, ou les deux en même temps quand on se ramasse une tôle.
  • La concentration parfois difficile : certaines biblis sont plutôt calmes, mais d’autres sont de vraies discothèques. Les élèves en prépa se tiennent généralement bien, mais on a tous eu un(e) voisin(e) bruyant(e), qui tape comme un(e) malade sur son clavier comme si ça écrivait mieux, qui bouffe des chips, ou qui écoute le dernier album de Drake bien trop fort dans ses écouteurs.

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Travailler chez soi

Avantages :

  • Tout le matos à portée de main : ordi, livres, codes, surligneurs, crayons, bouffe (des gâteaux, on s’est compris), café, rien ne manque à l’appel et ne saurait entraver votre réussite. Rien non plus à se trimballer comme un pèlerin de Compostelle tous les matins.
  • Le confort maximal : travailler en pyjama ? Se faire une tasse de thé à dix heures, treize heures, dix-sept heures ? Un petit café moka à l’italienne ? Qu’à cela ne tienne ! (je rêvais d’employer l’expression dans un article). Vous pouvez vous mettre à l’aise et bosser dans une ambiance hÿgge à la danoise.
  • La tranquillité absolue : pas d’emmerdeurs de bibliothèque, que du calme et de la sérénité pour bien assimiler les délais de recours devant la chambre de l’instruction. Enfin, sauf si vous avez un voisin saxophoniste ou des travaux dans la rue…
  • Un gain de temps appréciable : pas la peine de se maquiller, de s’habiller, de se coiffer, de se laver. De toute manière, la seule personne qui vous verra de la journée c’est votre code pénal, et il n’est pas très regardant. Lui-même tire un peu la tronche tout barbouillé de surligneur et de post-its.
  • Pas de temps de trajet : enfin si, un petit quand même, du lit jusqu’au bureau. Si vous habitez comme moi dans un hôtel particulier de 1200 m2 sur l’Ile de la Cité, ça peut prendre quelques minutes.

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Inconvénients :

  • La solitude : pas d’amis à qui parler, avec qui débriefer le DS de la veille, avec qui se lamenter après une tôle ondulée en droit public, avec qui se demander si la composition pénale est une mesure alternative aux poursuites ou pas. Mais il y en a qui aiment entendre le son de leur fourchette sur l’assiette en mangeant le midi.
  • Les tentations : « Le meilleur moyen de résister à la tentation, c’est d’y céder», disait Oscar Wilde. Et ben autant vous dire qu’il n’aurait jamais eu l’ENM, ça c’est clair. Toutes les excuses ménagères sont bonnes pour éviter de bosser : « Tiens, ça fait longtemps que j’ai pas lavé les carreaux… » « Tiens, et pourquoi pas changer le joint de la machine à laver ? ». Les deux plus terribles s’appellent quand même Facebook et Youtube.
  • Pas de séparation nette entre travail et loisirs : quand on part de chez soi et qu’on fait sa petite journée de boulot, ça donne l’impression d’avoir un métier, une vie stable et bien rangée, et on culpabilise moins en se vautrant sur son canapé devant Netflix.


Je l’avoue, j’ai fait partie des casaniers pendant longtemps. Je n’arrivais pas à me concentrer dans une bibliothèque : les prétextes à la distraction étaient trop nombreux et mon travail assez improductif.

Mais j’ai renié ma caste en prépa ENM en découvrant les joies de la bibli : la camaraderie, le soutien et le réconfort qu’apporte le sentiment de se sentir « tous dans le même bateau, et les échanges avec les autres durant les pauses (sans lesquels ce blog n’aurait sans doute jamais existé). Et entre nous, je me connais et je sais que je n’aurai jamais eu la force d’esprit et la volonté nécessaire pour parvenir à travailler correctement chez moi.

Bref, je fais désormais partie des « bibliothèquophiles » convaincus !

 

From ENM, with love


5 réflexions sur “Bosser le concours de l’ENM chez soi ou en bibliothèque ?

  1. Bonjour,

    J’aurai voulu savoir à titre indicatif combien de temps tu travaillais par jour en moyenne? (Horaires et pause) Histoire d’avoir une idée pour ma préparation l’année prochaine !

    Merci d avance !

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    1. Bonjour Elijah! Ce n’est qu’à titre indicatif que je divulgue cette information hautement secrète, dans la mesure où la réussite n’est pas uniquement fonction du nombre d’heures de révisions, et qu’il vaut mieux travailler efficacement trois heures que passer une journée de bibli entrecoupée de pausés café et de scrollage de fil d’actualité Facebook 🙂 En gros, mes journées ressemblaient à ça : en semaine et le samedi, 9h-12h30, 14h-18h30 (avec une pause au milieu pour aller jacasser avec d’autres forçats de la prépa). Impossible pour moi de travailler le soir chez moi, je n’y arrivais pas, ni le dimanche. Je précise que ces plages de révisions étaient possibles hors des périodes de cours en amphi, où là bien sûr il est impossible (et surtout improductif) d’espérer travailler en rentrant chez soi le cerveau grillé…. Pour les oraux, c’est une autre histoire, et là il n’y a plus d’horaires qui tiennent : chaque minute de révision est une minute de gagnée! Mais il y a encore le temps de voir venir…

      Voilà en gros le fond de ma pensée, certain.e.s réussiront avec plus ou moins d’heures de révisions accumulées, mais un minimum de sept heures de révisions par jour me semble le minimum pour préparer sérieusement. Bonne préparation à toi !

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  2. Bonjour,

    Je suis diplomé d’école de commerce avec une dizaine d’années d’expérience dans la finance.
    Je souhaite passer le 3ème concours de l’ENM mais j’ai deux interrogations cependant:
    – est il possible de préparer le concours en parallèle d’une activité professionnelle ?
    – si non, combien de temps faudrait il consacrer en full time à la préparation du concours pour un profil (non juriste) comme le mien ?
    1, 2 ans ?

    Par avance merci pour ton aide

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    1. Bonjour Gaël ! Je réponds à ton commentaire mille ans après la bataille : le temps me manque pour alimenter le blog comme j’aimerais le faire ! A propos de tes deux questions, point par point :
      – oui, il est possible de passer le 3ème concours en parallèle d’une activité professionnelle, il est même conçu pour cela et a été réformé en 2020 pour permettre de concilier les deux encore plus « aisément ». L’ENM est bien consciente qu’il est impossible d’exiger de futur.e.s candidat.e.s qu’ils/elles mettent totalement entre parenthèses leur vie professionnelle pour un voire deux ans de préparation sans garantie de résultat au bout… Et cela créerait surtout de très importantes inégalités entre celles et ceux qui disposent d’un patrimoine suffisant pour se permettre d’arrêter de travailler et les autres ! 🙂
      – logiquement, pour les trois concours, l’objectif doit être de réussir en une seule année : la préparation est bien suffisamment exigeante pour avoir envie de rempiler une année supplémentaire ! Pour le 2ème et 3ème concours, le nombre de candidats étant beaucoup plus faible et le concours par conséquent moins sélectif, il me semble qu’il faut viser la réussite en une année encore plus que pour le 1er concours. Le fait de ne pas être juriste ne change pas grand chose à la donne, les préparations reprennent tout depuis la base et sont adaptées aux néophytes qui souhaitent se reconvertir.

      Je vous souhaite le meilleur dans votre projet de reconversion, tout particulièrement dans les circonstances actuelles, ainsi qu’un grand merci pour votre fidélité !

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  3. Bonjour ,
    Je viens du milieu hospitalier, j’aimerais préparer le 2eme concours , et je n’ai aucune notion de droit bien sûr. Crois tu que préparer le concours avec des cours de capacité en droit serait bien ? J’ai l’impression que le programme se ressemble , mais je me demande si cela pourrait être suffisant ?

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